Faut-il mentionner les points de fidélité de sa carte de crédit dans sa déclaration d’impôts ?
Peu de gens le savent, mais les points de récompense obtenus grâce aux dépenses faites avec votre carte de crédit peuvent, dans certains cas, être considérés comme un revenu sur lequel vous devez payer de l’impôt.
Pas de panique : si vous faites seulement des dépenses personnelles avec votre carte de crédit, cela ne vous concerne pas. Vous n’avez rien à déclarer.
C’est lorsque vous utilisez une carte de crédit pour faire des dépenses d’affaires qu’il faut être attentif, qu’il s’agisse d’une carte fournie par votre employeur ou encore d’achats réalisés avec votre carte personnelle, qui vous ont ensuite été remboursés. Ce que vous vous procurez avec vos points accumulés est alors considéré, dans certaines circonstances, comme un « avantage imposable ». En d’autres mots, la valeur de cet avantage s’ajoute à votre revenu annuel pour le calcul des impôts, au même titre qu’un cadeau en argent offert par votre employeur, par exemple. Ainsi, si vous gagnez 50 000 dollars par année et que vous touchez un avantage imposable de 2 000 dollars, vous serez imposé sur 52 000 dollars.
Quand les points constituent-ils un avantage imposable ?
Pour que des points de récompense accumulés grâce à une carte de crédit ou à un programme de fidélisation soient considérés comme un avantage imposable, deux conditions de base doivent être réunies.
Comme mentionné plus haut, les points doivent avoir été accumulés grâce à des dépenses d’affaires. L’autre critère essentiel : il faut que ces points de récompense soient utilisés à des fins personnelles (acheter un billet d’avion pour voyager avec votre famille, par exemple). Ce sont les points utilisés qui comptent, et non ceux accumulés (mais pas encore utilisés).
Si la carte vous appartient
Quand c’est vous qui gérez les points (parce que vous utilisez votre propre carte de crédit pour les achats du bureau), c’est à vous de déclarer l’avantage imposable dans votre déclaration de revenus.
Or, quand un employé se sert de la même carte de crédit personnelle pour des dépenses personnelles et d’affaires, il est bien difficile, au moment d’utiliser les points, de déterminer lesquels sont associés aux dépenses personnelles et lesquels sont plutôt liés aux dépenses d’affaires.
L’Agence du revenu du Canada a donc simplifié les règles : comme employé, vous êtes tenu de déclarer ces points comme étant un revenu si vous les convertissez en espèces, c’est-à-dire en argent ou sous forme de chèque ou de dépôt direct. (Si vous utilisez vos points pour rembourser certains achats effectués avec votre carte de crédit, pas de souci, ce n’est pas imposable, soutient Marc-André Sauvé, fiscaliste et comptable professionnel agréé au sein du cabinet Mallette).
Vous devez aussi déclarer l’avantage reçu grâce à l’échange de points si vous les avez obtenus d’une manière qui représente une forme de rémunération convenue avec votre employeur. Ce serait par exemple le cas si ce dernier vous permettait de maximiser vos points en vous autorisant à payer avec votre carte des dépenses qui ne vous concernent pas, comme des déplacements faits par d’autres employés.
Dans les faits, ces cas sont « rares », affirme Marc-André Sauvé, de Mallette.
Si la carte appartient à l’employeur
Lorsqu’un employeur gère les points (dans le cas d’une carte de crédit d’entreprise), « il sera toujours tenu de déclarer la juste valeur de tout avantage accordé à l’employé lorsque les points sont encaissés », explique Marc-André Sauvé. Cette déclaration se fait sur les relevés 1 et T4 de l’employé.
Exemples concrets
Voici quelques exemples concrets pour vous montrer comment ces règles s’appliquent :
C’est un avantage imposable
- Vous utilisez régulièrement votre carte de crédit personnelle pour acheter des cartouches d’encre et de la papeterie chez Costco. Votre employeur vous rembourse ces dépenses. Vous recevez ensuite un chèque de Costco correspondant au total de vos récompenses accumulées au cours de la dernière année. Vous devez ajouter le montant de ce chèque à vos revenus dans votre déclaration fiscale, puisque vos récompenses ont été converties en espèces (dans ce cas-ci sous forme de chèque).
- Vous utilisez votre carte de crédit personnelle pour payer des dîners d’affaires. Votre employeur vous rembourse ces dépenses. Vous faites comme une lectrice de Dollars et cents et vous utilisez les points de votre carte de crédit pour investir dans votre REER et votre CELI. Vous devez déclarer les sommes investies, parce que vous avez converti vos points en espèces (dans ce cas-ci sous forme de cotisations), juge Marc-André Sauvé.
- Vous utilisez votre carte de crédit personnelle pour payer les billets d’avion de trois de vos collègues pour un congrès. Votre employeur vous rembourse ces dépenses. Vous utilisez les points de votre carte de crédit pour acheter des jouets pour vos enfants et des billets de spectacle. Vous devez déclarer la « juste valeur marchande » de ces jouets et de ces billets dans votre déclaration de revenus ; comme vous vous êtes servi de votre carte de crédit personnelle pour effectuer les dépenses d’autres employés, les points obtenus de cette façon sont considérés comme une autre forme de rémunération (autrement dit, une rémunération déguisée sous forme de points).
- Vous utilisez la carte de crédit fournie par votre employeur pour payer vos repas et vos nuitées lors de vos déplacements d’affaires. Votre employeur vous permet d’utiliser les points de récompense et vous vous en servez pour acheter un billet d’avion pour un voyage personnel. Votre employeur doit déclarer l’avantage imposable sur vos relevés 1 et T4, puisque c’est lui qui gère les points. Cet avantage doit correspondre à la « juste valeur marchande » du billet d’avion que vous avez acheté.
Ce n’est PAS un avantage imposable
- Vous utilisez votre carte de crédit personnelle pour acheter un bureau et une chaise de travail. Votre employeur vous rembourse ces dépenses. Vous utilisez les points de votre carte de crédit pour vous procurer une télévision qui agrémentera votre chambre. Dans ce cas, il ne s’agit pas d’un avantage imposable, puisque vous n’avez pas bénéficié d’une rémunération déguisée (le bureau et la chaise vous servent directement pour le travail) et vous n’avez pas converti vos points en espèces.
Ne pas « jouer à l’autruche »
Dans les cas où c’est votre employeur qui doit déclarer un avantage imposable sur vos relevés fiscaux, c’est théoriquement à lui que les autorités fiscales poseront des questions si elles effectuent une vérification, souligne le fiscaliste Marc-André Sauvé. Sauf que « ce n’est jamais bon de jouer à l’autruche », ajoute-t-il.
Si vous pensez bénéficier d’un avantage imposable que votre employeur a omis de déclarer, vaut mieux lui en parler. Et si vous avez un doute concernant un possible avantage imposable que vous devez vous-même déclarer, il est préférable de vous informer auprès d’un comptable ou d’un fiscaliste. Parce que si les autorités fiscales jugent que vous n’avez pas payé votre juste part d’impôts pendant des années, vous devrez non seulement rembourser votre dette fiscale, mais aussi payer des intérêts et une pénalité, prévient Marc-André Sauvé. « Ça peut coûter assez cher ! »